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La Neutralité du net

La fin de la neutralité du net sonne-t-elle la fin d’Internet ?

L’Internet que nous connaissons va-t-il disparaître ? La décision prise par la FFC américaine (Federal Communication Commission) de mettre fin à la neutralité du Net menace-t-elle Internet ? Pour ses détracteurs, la mesure, décidée aux USA en décembre 2017 et rentrant en vigueur en février 2018, va changer radicalement le fonctionnement d’Internet.

Au passage nos libertés seraient menacées. Les opérateurs télécom américains, se préparent-ils à prendre le contrôle du  » network des network  » ? L’infrastructure au cœur d’Internet, élément vital du web et de notre économie digitalisée, est-il un bien commun à réguler ? Par-delà ces inquiétudes légitimes, la question du financement des infrastructures se pose.

La neutralité, c’est l’interdiction de discriminer les trafics

La philosophie initiale d’Internet, c’est la neutralité : toutes les données sont égales sur le net. Un opérateur télécom doit se borner à transporter les données le plus vite possible, d’un point A à un point B. Il n’a pas à décider si nos données sont plus ou moins importantes et doivent bénéficier d’un traitement préférentiel. Il n’a pas à décider si des trafics doivent être pénalisés, ralentis ou surtaxés.

Autoriser l’opérateur à discriminer les trafics, seul, c’est autoriser tous les types de stratégies. En clair un opérateur peut décider de pénaliser les données d’une plateforme de service avec laquelle il est en concurrence ou de favoriser les données d’un partenaire.

Bouleversement du pouvoir sur le web

En donnant à l’infrastructure d’Internet le statut de bien privé administré par les opérateurs, et non plus de bien commun, la FCC renverse le rapport de force entre les acteurs. Avant, l’utilisateur était un client qui souhaitait accéder au service d’une plate-forme comme Facebook ou Netflix. L’opérateur était rétribué pour sa contribution au service : transporter les trafics. Avec la possibilité de discriminer les trafics, l’utilisateur devient le produit, que les opérateurs peuvent revendre aux plateformes de service en fonction d’accords commerciaux.

Montée des débits et renversement du business model

L’enjeu est bien le financement des infrastructures du net. Les débits attendus vont exploser dans des proportions inimaginables : Internet des objets, réalité virtuelle, données pour l’intelligence artificielle, etc. Les investissements privés auront probablement du mal à suivre. Les opérateurs devront s’engager auprès de banques prêteuses pour de très longues périodes.

Comment les opérateurs rassurent-elles ces dernières sur leur pérennité ? Tout simplement en démontrant qu’ils maîtrisent leur business model, via une logique tarifaire et des accords de partenariats, et qu’ils maîtrisent la progression des flux, via l’application de technologies de discrimination. La fin de la neutralité du net est avant tout un enjeu de partage des revenus de l’Internet. Son effet de bord est un renforcement du pouvoir des opérateurs.

Une menace pour l’innovation ?

Nous sommes tous concernés. En tant que client d’Internet, notre liberté de choisir un service ou un autre serait  » téléguidée  » grâce à des politiques tarifaires habilles, à la hausse et à la baisse. En tant que citoyen, membre de mouvements alternatifs et communautaires pourrons-nous continuer à utiliser un service gratuit ou mener des class-actions contre de grands groupes ?

Et en tant qu’entrepreneur, nouvel entrant sur un marché, pourrons-nous bénéficier d’une bonne visibilité sur le Web et d’un débit d’accès Internet à un prix raisonnable ? Sera-t-il encore possible d’émerger et de concurrencer un acteur en place sans un (très cher) accord commercial avec un opérateur ? Confier aux seuls opérateurs des choix structurants pour le Web, l’Internet et l’économie digitale s’avère problématique. Une certaine régulation est nécessaire.

Déplacement du débat vers les terminaux

La résistance s’organise. L’Europe a choisi d’inscrire la neutralité du net dans la loi, ce qui lui donne plus de force. Les autorités de régulation sont très attentives aux tentatives de contournement à la neutralité des opérateurs comme Deutsche Télékom ou le portugais MEO.

Aux USA, certains états et les plateformes de service se dressent contre la mesure, avec peu de chance de succès pour le moment. Les régulateurs européens, conscient de la nature continue du net qui nous lie à la destinée des infrastructures américaines, savent que la résistance sera difficile.

Deux réponses pour cela. La première est déjà identifiée. Il s’agit d’élargir le champ de bataille vers la neutralité du Web et même vers la neutralité des terminaux. La meilleure façon d’assurer la liberté de l’utilisateur est de s’assurer qu’il puisse choisir librement ses plateformes, ses applications, depuis son PC, son smartphone ou son assistant vocal.

Deuxième réponse : l’Europe doit trouver un modèle alternatif et équitable de financement des investissements pour l’infrastructure du Net. Pourquoi ne pas imaginer un  » ICO  » (Initial Coin Offering, mix de crowdfunding et cryptomonaie) des infrastructures Internet européennes ? Notre indépendance est à ce prix et la voix de l’Europe sur le sujet portera loin.

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